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après ; au commencement, comme toujours, la flamme était faible. Dans la chambre voisine quelqu’un toussota, probablement un vieillard. La fille sortit. Le portier me demanda s’il fallait ouvrir la valise. La flamme de la bougie s’anima et éclaira le papier bleu à bandes jaunes, l’alcôve, la table dévernie, un petit canapé, une glace, une fenêtre et toute la petite chambre. Et, soudain, la frayeur d’Arzamass s’éveilla en moi. « Mon Dieu ! Comment passerai-je la nuit ici ? » pensai-je. — Ouvre, mon ami, dis-je au portier pour le retenir un peu. « Je m’habillerai le plus vite possible et irai au théâtre. »

Le portier ouvrit les bagages.

— Je t’en prie, mon ami, va chez le monsieur de la chambre No 8, qui est venu avec moi, et dis-lui que je suis prêt, et que je vais tout de suite passer le prendre.

Le portier sortit, et je commençai à m’habiller hâtivement, ayant peur de jeter un regard sur le mur. « Quelle sottise ! » pensai-je. « De quoi ai-je peur comme un enfant ? Je n’ai pas peur des revenants ? Oui, des revenants… Il vaudrait mieux avoir peur des revenants que de ce que je crains. Quoi ? Rien. Moi-même… Quelle sottise !… »

Je passai une chemise raide, empesée, froide, mis des boutons aux manchettes, pris ma redingote, des bottines neuves, et j’allai chez le propriétaire de Kharkoff. Il était prêt. Nous partîmes entendre Faust. En route il alla se faire friser les cheveux. Moi aussi, je me fis tailler les