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il avait contourné le bois et se préparait à attendre le matin pour s’emparer de Hadji Mourad, vivant ou mort.

Comprenant qu’ils étaient cernés, Hadji Mourad, qui avait remarqué au milieu de la futaie un petit fossé, résolut de s’y retrancher et de se défendre tant qu’ils auraient des cartouches et des forces. Il fit part de sa résolution à ses compagnons, et leur ordonna de construire une tranchée le long du fossé. Aussitôt les serviteurs se mirent à couper des branches, à creuser la terre avec leurs poignards, à faire un remblai. Hadji Mourad travaillait avec eux.

Aussitôt que le jour commença à poindre, le commandant des miliciens s’approcha du bois et cria :

— Hé ! Hé ! Hadji Mourad, rends-toi ! Nous sommes nombreux et vous êtes en petit nombre.

En réponse, du fossé, se montra une petite fumée, un coup de fusil retentit et une balle vint frapper le cheval d’un milicien. Le cheval vacilla, puis s’abattit. Aussitôt éclatèrent les coups de fusils des miliciens qui se trouvaient à la lisière du bois, et leurs balles, sifflant et bourdonnant, coupèrent des feuilles, des branches, frappèrent le remblai mais sans atteindre les hommes assis dans la tranchée. Mais le cheval de Gamzalo, qui s’était écarté, reçut une balle dans la tête. Il ne tomba pas, et, brisant ses entraves, il courut à travers les arbustes rejoindre les autres chevaux, et se serra contre eux en arrosant de son sang la jeune herbe.