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et absolument contraires à ce plan. Mais il ne se le cachait pas ; et il était aussi fier du plan de son expédition de 1845 celui de l’avancement lent, bien que ces deux plans fussent manifestement opposés.

La flagornerie perpétuelle, grossière, mensongère des hommes qui l’entouraient l’avait amené à un tel point qu’il ne voyait déjà plus ses propres contradictions ; ses actes, ses propos lui semblaient toujours concorder avec la réalité, la logique, ou même avec le simple bon sens, et il était tout à fait convaincu que toutes les mesures qu’il prenait, quelque stupides, injustes, inconséquentes qu’elles fussent, devenaient sensées, justes, conséquentes, du fait seul qu’il en était l’auteur.

Telle fut sa résolution concernant l’affaire de l’étudiant de l’académie de médecine militaire, sur laquelle Tchernecheff fit un rapport, après le rapport sur le Caucase.

Cette affaire était la suivante : Un jeune homme deux fois déjà refusé à un examen, le passait pour la troisième fois, mais de nouveau l’examinateur l’avait refusé. Alors l’étudiant, maladivement nerveux, voyant en cela une injustice, avait saisi un canif qui était sur la table, et, dans une sorte d’accès de folie, s’était jeté sur le professeur et lui avait fait quelques blessures sans aucune gravité.

— Quel est son nom ? demanda Nicolas.

— Brjezovski.

— Polonais ?