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— Évidemment le plan arrêté par Votre Majesté commence à porter ses fruits, dit Tchernecheff.

Ces louanges à ses capacités stratégiques étaient particulièrement agréables à Nicolas, car, bien que fier de ces capacités, au fond de son âme il reconnaissait qu’il ne les possédait pas. Mais maintenant il avait le désir d’entendre des louanges plus détaillées, à l’adresse de sa personne.

— Comment entends-tu cela ? demanda-t-il.

— Voici comment je le comprends : Si l’on avait suivi depuis longtemps le plan de Votre Majesté, d’avancer graduellement, même lentement, en coupant les forêts, ravageant les champs, le Caucase serait depuis longtemps conquis. J’attribue le ralliement de Hadji Mourad à cela seul. Il a compris qu’ils ne peuvent plus tenir.

— C’est vrai, dit Nicolas.

Bien que le plan d’un mouvement lent dans le pays ennemi, par la coupe des forêts et la destruction des vivres, appartînt à Ermoloff et à Veliaminoff, et qu’il fût juste l’opposé du plan de Nicolas, selon lequel il fallait d’un coup occuper la résidence de Schamyl et détruire ce repaire de brigands, plan qui avait été suivi en 1845 lors de l’expédition à Darguinsk, qui avait coûté tant de vies humaines, malgré cela, Nicolas s’attribuait le plan d’avancement lent, par la coupe systématique des forêts et la destruction des vivres. On pourrait penser que pour croire sien ce plan, il devait se cacher que c’était précisément lui qui avait insisté sur les opérations militaires entreprises en 1845