Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/121

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Durant les dix jours que Hadji Mourad a passés ici, il a vécu dans la même maison que le lieutenant-colonel prince Tarkanoff, chef du district de Chouminsk, qui se trouve ici pour affaires de service. C’est un homme vraiment digne, en qui j’ai une confiance absolue. Lui aussi a su gagner la confiance de Hadji Mourad, et par l’intermédiaire de lui seul, puisqu’il parle admirablement le tatar, nous avons causé des affaires les plus délicates et les plus secrètes. J’ai interrogé Tarkanoff sur Hadji Mourad, et il convient avec moi que, ou il fallait agir comme j’ai agi, ou enfermer Hadji Mourad dans une prison et le garder très sévèrement, car, si on le traitait mal, il ne serait pas facile à garder ; ou l’expulser tout à fait du pays. Mais ces deux dernières mesures, non seulement auraient détruit tout l’avantage qui résulte pour nous de la querelle entre Hadji Mourad et Schamyl, mais inévitablement eussent arrêté tout progrès du rayonnement et la possibilité d’une révolte des montagnards contre le pouvoir de Schamyl.

« Le prince Tarkanoff m’a dit être convaincu de la sincérité de Hadji Mourad ; il m’a dit aussi que Hadji Mourad est certain que Schamyl ne lui pardonnera jamais, et qu’il donnerait l’ordre de l’exécuter, malgré une promesse de pardon. La seule chose qui pourrait inquiéter Tarkanoff, dans ses rapports avec Hadji Mourad, c’est l’attachement de celui-ci à sa religion, et il ne cache pas que Schamyl pourrait agir sur lui de ce côté. Mais