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avec le rétablissement dans ses anciennes fonctions, et qu’il le menacera, s’il ne retourne pas, de faire périr sa mère, sa femme et ses six enfants. Je lui ai demandé s’il peut me dire franchement ce qu’il ferait s’il recevait un tel ultimatum de Schamyl. Hadji Mourad a levé vers le ciel les bras et les yeux et m’a dit que tout est entre les mains de Dieu, mais que lui ne se rendra jamais à son ennemi, parce qu’il est tout à fait convaincu que Schamyl ne lui pardonnera pas et qu’alors il ne resterait pas longtemps vivant. Quant à l’extermination de sa famille, il ne pense pas que Schamyl agisse aussi légèrement, premièrement, pour ne pas exaspérer davantage son ennemi et le rendre plus dangereux ; deuxièmement, parce-qu’en Daghestan il y a beaucoup de gens, même très influents, que cela détournerait de lui.

« Enfin, il m’a répété plusieurs fois que, quelle que soit la volonté de Dieu concernant l’avenir, maintenant une seule pensée le préoccupe : le rachat de la famille ; qu’il me supplie, au nom de Dieu, de lui venir en aide et de lui permettre de retourner dans les environs de Tchetchnia, où il pourrait, par nos chefs, se mettre en rapport avec sa famille, avoir toujours des nouvelles sur sa situation présente et trouver les moyens de la délivrer ; que plusieurs personnes, même quelques naïbs, de cette partie du pays ennemi sont plus ou moins attachés à lui ; que dans toute cette population conquise par les Russes ou neutre, il lui sera facile d’avoir, avec notre aide, des ramifications