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— On ne le pouvait pas. Schamyl avait sur lui le sang de mon frère Osman et celui d’Abounountzan. Je n’allai pas chez lui. Le général Rozen me donna alors le grade d’officier et m’ordonna d’être le chef de l’Abazie. Tout aurait très bien marché ; mais Rozen, au commencement, avait nommé chef de l’Abazie, le Khan de Nazikoumisk, Mahomet Mourza, et ensuite son frère Akhmet Khan. Celui-ci me haïssait. Il avait voulu que son fils épousât la fille de la Khan Saltanet, on ne la lui donna pas. Il pensa que c’était de ma faute. Il me haïssait et envoya ses serviteurs pour me tuer. Je parvins à leur échapper. Alors il fit une dénonciation contre moi au général Klugenau. Il lui dit que je défendais aux Abazes de donner du bois aux soldats. Il lui dit encore que j’avais mis le turban, — celui-ci, dit Hadji Mourad en indiquant le turban entourant son bonnet, — et que cela signifiait que j’étais entré au service de Schamyl. Le général ne le crut pas, et ordonna de ne pas me toucher. Mais quand le général partit pour Tiflis, Akhmet Khan mit à exécution un projet qu’il avait conçu : il me fit saisir par une compagnie de soldats, on m’enchaîna et m’attacha à un canon.

Durant six jours, ils me gardèrent ainsi. Le septième jour on me détacha et on m’amena à Ternir khan Choura. Quarante soldats, le fusil chargé, m’escortaient. On m’avait attaché les mains, et on avait donné l’ordre de tirer sur moi à la moindre tentative de fuite. Je le savais. En approchant de Monstch, il y avait un chemin très étroit