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à fumer en fronçant malhabilement ses lèvres rouges, pour rejeter la fumée.

— Ce n’est pas bien, dit sévèrement Gamzalo, et il sortit de la chambre.

Khan-Magom cligna de l’œil sur lui et, en continuant de fumer, se mit à interroger Loris Melikoff pour savoir où il était préférable d’acheter un bechmet de soie et un bonnet blanc.

— Vraiment, tu as donc tant d’argent ?

— Oui, pas mal, répondit Khan-Magom.

— Demande-lui d’où lui vient l’argent ? dit Eldar, en tournant vers Loris Melikoff son beau visage souriant.

— J’ai gagné au jeu, prononça rapidement Khan-Magom.

Et il raconta que la veille, en se promenant à Tiflis, il avait vu un groupe de Russes et d’Arméniens qui jouaient à pile ou face. Il y avait à l’enjeu trois grandes pièces d’or et beaucoup d’argent. Khan-Magom avait aussitôt compris le jeu, et, faisant tinter la monnaie de billon qu’il avait dans sa poche, il s’était glissé dans le cercle et avait dit qu’il jouait le tout.

— Comment le tout ! Avais-tu donc tant d’argent ? lui demanda Loris Melikoff.

— Non, j’avais en tout douze kopecks, répondit Khan-Magom en montrant les dents.

— Eh bien ! Et si tu avais perdu ?

— Voilà !… Et Khan-Magom montra son pistolet.

— Quoi ! Tu aurais rendu ?