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XXIV

Il n’y avait plus personne au salon que le prince Basile et la princesse Catiche, assis tous les deux sous le portrait de l’impératrice et causant avec vivacité ; ils s’interrompirent soudain à l’entrée de Pierre ; il ne put s’empêcher de remarquer que la princesse Catiche faisait un mouvement comme pour cacher quelque chose.

« Je ne puis voir cette femme, murmura-t-elle en apercevant la princesse Droubetzkoï.

— Catiche a fait servir le thé dans le petit salon, dit le prince Basile à la princesse Droubetzkoï ; allez, allez, ma pauvre amie, mangez un morceau, autrement vous n’y résisterez pas… »

Et il serra silencieusement et affectueusement le bras de Pierre.

« Rien ne restaure comme une tasse de cet excellent thé russe après une nuit blanche, » disait le docteur Lorrain, en savourant à petites gorgées le chaud breuvage dans une tasse en vieille porcelaine de Chine. Il se tenait debout dans le petit salon, devant une table sur laquelle on avait préparé le thé et une collation froide.

Tous ceux qui avaient passé la nuit dans la maison s’étaient réunis dans cette petite pièce, presque entièrement tapissée de glaces, et meublée de consoles dorées. C’était là que Pierre aimait à se retirer pendant les grands bals, car il ne savait pas danser ; il préférait s’y isoler pour observer et s’amuser des dames qui y venaient, toutes pimpantes et ruisselantes de diamants et de perles, voir se refléter dans ces glaces leurs brillantes images. À cette heure, l’éclairage ne se composait que de deux bougies ; sur une table, placée au hasard, des plats et des tasses se confondaient en désordre ; il n’y avait plus de toilettes de fête ; mais des groupes étranges, formés de personnes de toute condition, s’entretenaient à voix basse, laissant paraître, à chaque mot, à chaque geste, une incessante préoccupation sur le mystérieux événement qui allait se passer dans l’alcôve de la grande chambre. Pierre avait faim, mais il s’abstint de manger. Il chercha autour de lui sa compagne et la vit se glisser furtivement dans le salon à côté, où étaient res-