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par hasard ou par diverses intrigues, se sont approchés de lui et écartent soigneusement ceux qui pourraient les remplacer. De sorte que le tsar choisit, non parmi ces milliers d’hommes sains, énergiques, vraiment éclairés, honnêtes, qui aspirent aux affaires publiques, mais parmi ceux desquels Beaumarchais a dit : « Médiocre et rampant, l’homme parvient à tout. » Et si des Russes sont prêts à obéir au tsar, ils ne peuvent, sans un sentiment de révolte, obéir à des gens qu’ils méprisent. Votre croyance erronée à l’amour du peuple pour l’autocratie et son représentant le tsar, vous est peut-être donnée par le fait que partout où vous arrivez, à Moscou et autres villes, une foule de gens vous suit en courant et criant : « Hourra ! » Ne croyez pas que ce soit l’expression du dévouement à votre personne. Non, c’est une foule de curieux qui courrait de même à chaque spectacle inaccoutumé. Souvent, ces gens que vous prenez pour les représentants des sentiments du peuple à votre égard, ne sont qu’une foule ramassée et instruite par la police.

Si vous pouviez vous promener pendant le passage du train impérial, parmi les paysans placés derrière les troupes, le long de la voie, et écouter ce que disent ces paysans, les starostes et autres fonctionnaires des villages, amenés là par force des villages voisins, et qui,