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INTRODUCTION


Supposons qu’un homme n’a d’autre ressource pour vivre qu’un moulin. Fils et petit-fils de meunier, cet homme sait à fond, par tradition, comment il faut utiliser toutes les parties de son moulin, pour qu’il fonctionne bien. Sans connaître la mécanique, il a ajusté de son mieux tous les rouages afin d’obtenir une bonne mouture, et il a ainsi de quoi vivre et se nourrir.

Mais, un jour, il arrive à cet homme de réfléchir sur l’organisation de son moulin, et comme il a acquis quelques vagues notions de mécanique, il se met à observer pourquoi les roues tournent.

Allant des trémies aux meules, des meules au cylindre, du cylindre aux roues, puis à la digue et à la rivière, — il en arrive à se persuader que tout dépend de la digue et de la rivière. Cet homme est si heureux de sa découverte, qu’au lieu de s’inquiéter, comme d’habitude, de la qualité de la farine, de hausser et de baisser les meules, de tendre et de détendre la courroie ; il se