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— Où serait mon honneur de chevalier,
Si je ne mesurais mon courage avec la force tartare ?
Et il lança son fier coursier ;
Il passa le fleuve Dnieper
Sans mouiller le sabot de son cheval.
Il courut, Soukhman, près d’un vieux chêne,
Près d’un chêne tout rabougri.
Il arracha l’arbre et ses racines,
Un suc blanc coula du chêne.
Il prit le chêne comme un gourdin,
Et lança sa monture contre les Tartares.
Il tourna, retourna, Soukhman,
Levant et brandissant son gourdin.
Quand il frappait en avant, c’est toute une rue qu’il rasait,
Et en arrière, il détruisait une ruelle.
Il extermina ainsi, Soukhman, tous les ennemis.
Trois jeunes Tartares seulement s’enfuirent
Dans les arbustes, sous les ormes ;
Ils se cachèrent au bord du Dnieper.
Soukhman s’approcha du fleuve,
Et de leur cachette, les trois Tartares
Lancèrent à Soukhman trois flèches
Qui frappèrent ses côtes et trouèrent sa peau blanche.
Soukhman, — la Lumière, — retira les flèches
De ses côtes, de ses plaies ensanglantées,
Qu’il boucha de feuilles de coquelicot ;
Et il égorgea les trois petits Tartares.
Soukhman revint chez le duc Vladimir.
Il attacha son cheval à un poteau,
Et lui-même entra dans la salle du festin.
Vladimir, — le Duc, — le beau Soleil !