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bienfait s’oublie ou non. Si l’on me dit « Non », je te laisserai vivre. Si c’est le contraire, je te mangerai !

Et ils continuèrent leur route.

Bientôt ils rencontrèrent un vieux cheval.

Le moujik lui demanda :

— Dis-moi, cheval, si un bienfait s’oublie ou non.

Le cheval dit :

— Voilà ce que je sais, moi. J’ai vécu douze ans chez mon maître, et je lui ai donné douze chevaux, et, en même temps, je l’ai aidé dans la culture ; l’an passé, je devins aveugle ; alors il me fit travailler au moulin. Enfin, je perdis mes forces, et, un jour, je tombai sous la roue. On me frappa, on me traîna par la queue, et l’on me mit dehors. Quand je revins à moi, je m’éloignai. Où je vais ? je n’en sais rien !