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être sur un million d’individus assassinés par leur ordre et avec leur consentement. Loin de s’indigner du meurtre d’un Alexandre II ou d’un Humbert, les princes doivent plutôt s’étonner de ce que ces assassinats soient si rares, en raison de l’exemple constant et général qu’ils en donnent eux-mêmes.

La masse est comme hypnotisée : elle regarde, sans comprendre la signification de ce qui se passe devant elle. Elle voit, chez les monarques ou les présidents, le souci constant de la discipline militaire, les revues, parades et manœuvres auxquelles ils assistent et dont ils tirent vanité ; les civils accourent en foule pour voir leurs frères, affublés de vêtements ridicules, bigarrés, clinquants, transformés en machines, qui, au son des tambours et des trompettes et au commandement d’un homme, exécutent simultanément un même mouvement, sans en comprendre la signification. Celle-ci, pourtant, est simple et claire : c’est tout bonnement la préparation à l’assassinat ; c’est l’abrutissement