Page:Tolstoï - Ce qu’il faut faire.djvu/128

Cette page a été validée par deux contributeurs.

baraques, et que le peuple regarde, chante et reçoit une nourriture spirituelle qu’il ne tient pas de nous, à qui il incombait de la lui fournir ; et nous, qui justifions notre oisiveté par cette nourriture spirituelle que nous sommes censés lui offrir, nous restons là à clignoter des yeux[1]. Mais nous ne devons pas clignoter des yeux, la dernière justification va manquer sous nos pieds. Nous nous sommes spécialisés. Nous avons chacun notre fonction particulière. Nous sommes le cerveau du peuple. Lui nous nourrit, et nous, nous l’enseignons. Mais que lui avons-nous enseigné, et que lui enseignons-nous ? Il a attendu des années, des dizaines, des centaines d’années. Et nous discutions, nous nous instruisions l’un l’autre, nous nous amusions, oubliant tout à fait le peuple. Nous l’avions si bien oublié,

  1. Locution russe analogue à notre locution française : se croiser les bras.