Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 2.djvu/386

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le vieillard sourit sous ses moustaches blanches.

« D’aucuns, comme notre ami Swiagesky et le comte Wronsky, prétendent faire de l’industrie agricole ; mais jusqu’ici cela n’a servi qu’à manger son capital.

— Pourquoi n’arrivons-nous pas à faire comme le marchand ? demanda Levine frappé de cette idée.

— À cause de notre manie d’entretenir le feu sacré, comme vous dites : c’est un instinct de caste. Les paysans ont le leur : un bon paysan s’obstinera à louer le plus de terre possible, et, qu’elle soit bonne au mauvaise, il labourera quand même.

— Nous sommes tous pareils ! dit Levine. Je suis bien enchanté de vous avoir rencontré, ajouta-t-il en voyant approcher Swiagesky.

— Nous nous retrouvons pour la première fois depuis le jour où nous avons fait connaissance chez vous, fit le vieillard en s’adressant à Swiagesky.

— Et vous venez certainement de médire du nouvel ordre des choses, répondit celui-ci en souriant.

— Il faut bien se soulager le cœur. »


CHAPITRE XXX


Swiagesky prit Levine par le bras et s’approcha avec lui d’un groupe d’amis parmi lesquels il