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ils venaient, et pour quelles causes. Aksénov s’était approché, lui aussi, et, la tête baissée, il écoutait ce qui se disait. L’un des nouveaux forçats était un vieillard d’une soixantaine d’années, d’une haute stature, à barbe grise et taillée. Il racontait les motifs de sa condamnation.

— C’est ainsi, mes frères, disait-il. On m’a envoyé ici pour rien. J’ai dételé un cheval d’un traîneau : on m’a saisi, en disant que je volais. Et moi j’ai dit : « Je ne voulais qu’aller plus vite ; vous voyez bien que j’ai lâché le cheval… D’ailleurs le yamschtschik est mon ami… Il n’y a donc pas délit. » — « Non, me dit-on, tu l’as volé. » Et ils ne savaient ni où ni quand j’avais volé. Certes, j’avais commis des méfaits qui auraient dû me conduire ici depuis longtemps. Mais on ne put jamais me prendre sur le fait. Et aujourd’hui, c’est contre toute loi que l’on me déporte ici. Mais attendons… J’ai