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— Alors, tiens-moi les pieds un peu plus haut. Peux-tu ?

— Mais pourquoi pas ? C’est très facile.

Guérassim souleva les pieds du malade qui, aussitôt, ne sentit plus aucune douleur.

— Et pour le bois, comment feras-tu ?

— Ne vous inquiétez pas. Nous avons le temps.

Ivan Ilitch lui dit de s’asseoir et de maintenir ses pieds, puis il se mit à causer avec lui. Et, chose étrange, il lui sembla qu’il allait mieux quand Guérassim était avec lui.

À partir de ce jour, Ivan Ilitch appelait de temps en temps Guérassim, pour qu’il lui tint les pieds sur ses épaules, et il aimait à causer avec lui.

Guérassim apportait à cela de l’adresse, de la complaisance, et surtout une bonté qui attendrissait Ivan Ilitch. La santé, la force et la vigueur des autres offensaient Ivan Ilitch ; la force et la vigueur de Guérassim, loin de l’irriter, le calmait.

Ce qui le tourmentait le plus, c’était le mensonge. Le mensonge de tous qui s’accordaient à dire qu’il était simplement malade et non pas mourant, et qu’il n’avait qu’à être calme et continuer son traitement pour se remettre complètement. Mais il savait bien, lui, que tout ce que l’on entreprendrait n’aboutirait qu’à des souffrances encore plus douloureuses et à la mort. Ce mensonge le torturait. Il souffrait de voir qu’on lui cachait ce que chacun savait et qu’il savait lui-