Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/64

Cette page a été validée par deux contributeurs.

terminé, il se rappela que cette affaire personnelle était l’état de son intestin. Mais, prenant sur soi, il se rendit au salon, pour le thé. Il y avait du monde. On causait, on jouait du piano, on chantait ; le prétendant de sa fille était là. Comme le remarqua Prascovie Fédorovna, Ivan Ilitch passa la soirée plus joyeusement que d’habitude ; cependant pas un instant il n’oubliait qu’il avait à se préoccuper sérieusement de son intestin. À onze heures, il prit congé de ses hôtes et se retira dans sa chambre. Depuis qu’il était malade, il dormait seul, dans une petite pièce contiguë à son cabinet. Il se déshabilla et prit un roman de Zola ; mais au lieu de lire il se mit à songer. Dans son imagination, il se représentait la guérison si ardemment désirée de son intestin… « Assimilation, sécrétion, fonctionnement régulier, oui, tout est là, se disait-il. Il n’y a qu’à aider la nature. » Il se rappela qu’il avait une potion à prendre. Il se leva et prit son remède, puis il se coucha sur le dos, observant l’effet du remède, et le soulagement qu’il amenait par degrés. « Il n’y a qu’à suivre le traitement avec régularité et à éviter toute influence nuisible. Je me sens déjà mieux… beaucoup mieux. »

— Il toucha son côté et n’éprouva aucune douleur.

« Tiens, je ne le sens plus. Je me trouve vraiment mieux ».

Il éteignit la bougie et se coucha sur le côté. « L’intestin va mieux, l’assimilation se fait. »