Quand j’ouvris les yeux et le regardai, tout d’un coup il s’adressa à moi résolument, d’un ton irrité :
— Peut-être vous est-il désagréable de voyager en ma compagnie sachant qui je suis ? Dans ce cas je m’en irais.
— Oh, non, pourquoi ?
— Et bien alors, ne voulez-vous pas du thé ? Mais il est très fort.
Il me versa du thé.
— Ils le disent… et ils mentent… dit-il.
— De quoi parlez-vous ? demandai-je.
— Mais toujours de la même chose : de leur amour. Vous ne désirez pas dormir ?
— Pas du tout.
— Alors voulez-vous que je vous raconte comment cet amour m’a conduit à ce que vous savez ?
— Volontiers ! si cela ne vous est pas pénible.
— Non, ce qui m’est pénible c’est le silence. Buvez donc le thé… Est-il trop fort ?
Le thé était en effet comme de la bière, j’en bus quand même un verre. À ce moment passa le conducteur. Pozdnichev l’accompagna d’un regard méchant et commença seulement quand il fut sorti.