Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/145

Cette page a été validée par deux contributeurs.

notre conscience et qu’elle ne nous donne pas le bonheur. Aussi, ne peut-on méconnaître la légitimité du désir d’en changer. Un jeune homme peut prendre son rêve pour les déductions de la raison, mais moi, je ne suis pas un jeune homme et je vous parlerai de moi. En écoutant la conversation de ce soir, la même pensée m’est venue. Il est évident pour moi que ma vie ne peut me donner la paix de l’âme et le bien. L’expérience et la raison me le montrent. Alors qu’attends-je ? Du matin au soir on travaille pour la famille, et il résulte que ni moi ni ma famille ne vivons selon Dieu, et que nous nous embourbons de plus en plus dans le péché. On travaille pour la famille, et il n’en résulte pour elle rien de bon, parce que ce qu’on fait pour elle n’est pas bien. C’est pourquoi je me demande souvent s’il ne vaudrait pas mieux pour moi, changer de vie et faire précisément ce que disait le jeune homme, cesser de me soucier de ma femme et de mes enfants pour ne plus songer qu’à mon âme.

Ce n’est pas en vain qu’on trouve chez Paul : Celui qui est marié se soucie de sa famille ; celui qui n’est pas marié, ne pense qu’à Dieu.

À peine l’homme marié avait-il terminé que toutes les femmes présentes, y compris la sienne, le prirent à partie.

— Il fallait songer à cela auparavant, remarqua une femme âgée.