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franchi un grand nombre d’initiations, était promu au plus haut grade et rapportait beaucoup pour le bien commun de l’œuvre franc-maçonne en Russie. Tous les maçons de Pétersbourg venaient chez lui, tous le flattaient, tous pensaient qu’il cachait et préparait une surprise.

La tenue solennelle de la loge du deuxième degré, où Pierre avait promis de communiquer ce qu’il devait transmettre aux frères de Pétersbourg de la part des chefs supérieurs de l’ordre, était fixée. Elle se trouva au complet. Après les cérémonies ordinaires, Pierre se leva et commença son discours :

— « Chers frères — il s’arrêta en rougissant, tenant à la main son discours écrit — ce n’est pas assez d’observer nos mystères dans le calme de la loge, il faut agir, agir. Nous sommes endormis et il nous faut agir. » Pierre prit son cahier et se mit à lire :

— « Pour répandre la vérité pure et faire triompher la vertu, nous devons purifier les hommes des préjugés, lisait-il, élaborer des règles conformes à l’esprit du temps, prendre sur nous l’éducation de la jeunesse, nous unir par des liens indissolubles avec les hommes les plus intelligents, vaincre hardiment et en même temps avec prudence la superstition, la méfiance et la bêtise, former parmi les hommes dévoués à nous un noyau de gens liés par l’unité du but et qui aient le pouvoir et la force.