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jours, ne sachant véritablement que dire ; et il le répéta jusqu’au moment où Hélène fut près d’eux.

Hélène sortit avec Natacha dans le salon. Sans rester au souper, les Rostov partirent.

Natacha ne dormit pas de toute la nuit. La question insoluble : aimait-elle Anatole ou le prince André ? la tourmentait. Elle aimait le prince André, elle se rappelait vivement combien elle l’aimait ; mais elle aimait aussi Anatole, c’était indiscutable. « Autrement cela aurait-il pu être ? » pensait-elle. « Après ce qui s’est passé, si j’ai pu, en lui disant adieu, répondre à son sourire par un sourire, si j’ai pu faire cela, c’est la preuve que je l’ai aimé depuis le premier instant. Alors il est bon, noble, beau, et on ne peut point ne pas l’aimer. Que dois-je faire si je l’aime et si j’en aime un autre ? » se disait-elle sans pouvoir répondre à ces terribles questions.