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Spéransky. L’œuvre elle-même des réformes, qu’il connaissait vaguement, et l’acteur principal, Spéransky commençaient à l’intéresser si passionnément que bientôt la révision du code militaire occupa la seconde place dans ses préoccupations.

Le prince André se trouvait dans une situation des meilleures pour être bien accueilli dans les cercles les plus divers et les plus élevés de la société pétersbourgeoise. Le parti réformateur le recevait et l’accueillait hospitalièrement ; 1o parce qu’il avait la réputation d’un homme de grand esprit et très instruit ; 2o parce que l’émancipation de ses paysans le classait comme libéral. Le parti des anciens, mécontent, s’adressait à lui parce qu’il était le fils de son père et cherchait en lui la sympathie en déplorant les réformes. La société féminine, le monde, le recevait gracieusement parce qu’il était un riche et brillant parti, un personnage presque nouveau, avec l’auréole de l’histoire romanesque de sa mort imaginaire et de la fin tragique de sa femme. En outre l’opinion générale de tous ceux qui le connaissaient auparavant était qu’il avait beaucoup changé à son avantage pendant ces cinq ans, qu’il s’était à la fois adouci et raffermi, qu’il n’y avait plus en lui l’attitude fière et caustique d’autrefois, mais le calme qui s’acquiert avec les années. On parlait de lui, on s’intéressait à lui et tous désiraient le voir.

Le lendemain de sa visite au comte Araktchéiev,