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s’enfuit de la chambre. Quelques minutes après, mademoiselle Bourienne entra chez la princesse Marie en souriant et raconta quelque chose, de son ton agréable. La princesse Marie essuya hâtivement ses larmes, à pas résolus elle s’approcha de mademoiselle Bourienne, et, sans se rendre compte elle-même de ce qu’elle faisait, avec la hâte de la colère et l’emportement dans la voix, elle se mit à crier à la Française : « C’est vilain, c’est bas, grossier, de profiter de la faiblesse… » Elle n’acheva pas. « Sortez de ma chambre ! » s’écria-t-elle ; et elle sanglota.

Le lendemain, le prince ne dit pas un mot à sa fille, mais elle remarqua, qu’au dîner, il ordonna de servir mademoiselle Bourienne la première. À la fin du repas, quand le valet, suivant l’habitude, versa le café en commençant par la princesse, le prince, tout à coup, devint furieux, jeta sa canne sur Philippe et aussitôt donna l’ordre de son enrôlement comme soldat.

— On n’écoute pas… J’ai dit deux fois !… On n’écoute pas… C’est la première personne dans cette maison. C’est ma meilleure amie, cria le prince. Et si tu te permets encore une fois ce que tu as osé hier… s’écria-t-il avec colère, s’adressant pour la première fois à la princesse Marie… si tu t’oublies devant elle, je te montrerai qui est le maître dans la maison. Va-t’en, que je ne te voie pas ! Demande-lui pardon.