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éloignait les jeunes gens qui pouvaient être des partis et qui parfois venaient chez eux. D’amies, la princesse Marie n’en avait pas. Cette année, à Moscou, elle avait perdu toute illusion sur deux personnes très intimes : mademoiselle Bourienne, avec qui elle ne pouvait être tout à fait franche, maintenant, lui devenait désagréable, et, pour certaines raisons, elle commençait à s’éloigner d’elle ; Julie, qui était à Moscou, et avec qui la princesse Marie correspondait depuis cinq années, se trouva tout étrangère à ses yeux, quand de nouveau elle se lia avec elle personnellement. Julie, depuis la mort de ses frères, était devenue l’un des plus riches partis de Moscou, et se lançait dans le tourbillon des plaisirs mondains. Elle était entourée de jeunes gens qui, comme elle le pensait, appréciaient soudain toutes ses qualités. Julie se trouvait à cette période de la vie des demoiselles mondaines qui vieillissent et savent que leur dernière chance de se marier est arrivée, et que maintenant ou jamais se décidera leur sort. La princesse Marie, avec un sourire triste, se rappelait chaque jeudi qu’elle n’avait maintenant personne à qui écrire, puisque Julie, dont la présence ne lui donnait plus de joie, était ici, et qu’elles se voyaient chaque semaine. Comme un vieil émigrant qui a renoncé à épouser la dame chez qui, pendant plusieurs années, il passa toutes ses soirées, la princesse Marie regrettait que Julie fût ici, et de n’avoir