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la ramassa. Le comte et Siméon le regardaient. Tout à coup, ainsi qu’il arrive souvent, le son des cris de poursuite se rapprocha subitement ; les gueules jappantes des chiens et les « vélauts » de Danilo semblaient tout proches d’eux.

Le comte se retourna et aperçut à sa droite Mitka, qui, les yeux sortant des orbites, regardait le comte, et, en soulevant son bonnet, lui désignait l’autre côté en avant.

— Garde ! — s’écria-t-il d’une telle voix, qu’on voyait qu’il n’avait pu retenir plus longtemps cette exclamation. Et il sauta, en lâchant les chiens dans la direction du comte.

Le comte et Siméon quittèrent la lisière et aperçurent à gauche le loup, qui, en se balançant, à petits sauts, s’approchait de cette même lisière. Les chiens furieux poussèrent un cri, se délivrèrent de leurs laisses et se jetèrent vers le loup devant les pattes des chevaux.

Le loup s’arrêta. Gauchement, comme s’il eût eu le torticolis, il tourna sa large tête vers les chiens puis, avec le même balancement, fit un bond, un deuxième, et, agitant sa queue, disparut à l’orée du bois.

Au même moment, du côté opposé de la lisière, avec un hurlement semblable à des gémissements, un, deux, trois chiens s’élancèrent, et toute la meute courut par les champs à la poursuite du loup. Derrière les chiens à courre, un buisson de