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me suis-je tant hâté ! » — Nicolas commença à s’habituer à son ancien monde. Son père et sa mère étaient les mêmes, seulement ils avaient vieilli un peu. En eux, il y avait de nouveau une certaine inquiétude et parfois le désaccord, inconnu autrefois, et qui provenait, Nicolas l’apprit bientôt, du mauvais état des affaires. Sonia avait déjà dix-neuf ans passés. Elle avait cessé d’embellir, elle ne promettait rien de plus, mais c’était suffisant. Elle respirait toute le bonheur et l’amour depuis que Nicolas était arrivé, et l’amour constant, inébranlable de cette jeune fille, agissait joyeusement sur lui. Pétia et Natacha surprirent le plus Nicolas.

Pétia était déjà un grand garçon de treize ans, joli, intelligent et endiablé, dont la voix commençait à muer. Natacha étonna pendant longtemps Nicolas, et il riait en la regardant.

— Pas du tout la même ! disait-il.

— Quoi, enlaidie ?

— Au contraire… mais de l’importance. La princesse ! lui chuchotait-il.

— Oui, oui, disait joyeusement Natacha.

Elle lui raconta son roman avec le prince André, son arrivée à Otradnoié et lui montra sa dernière lettre.

— Quoi, es-tu content ? Moi, je suis maintenant si heureuse, si tranquille !

— Très heureux, répondit Nicolas. C’est un brave homme. Eh bien ! Toi, es-tu éprise ?