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Marie, ce qu’elle pensait de nos prêtres et de nos icônes et plaisantait…

Il blessait sans cesse, très péniblement, la princesse Marie, mais elle lui pardonnait sans peine. Pouvait-il être coupable envers elle, pouvait-il, l’aimant comme elle le savait, être injuste à son égard ? Et qu’est-ce que c’est que la justice ? La princesse ne pensait jamais à ce mot « l’équité ». Toutes les lois compliquées de l’humanité se réduisaient pour elle à une loi simple et claire, la loi d’amour, de sacrifice que nous a donnée celui qui, étant Dieu, souffrit pour l’humanité avec amour. Qu’avait-elle à voir avec la justice et l’injustice des hommes ? Elle-même devait souffrir et aimer, et elle le faisait.

Pendant l’hiver le prince André vint à Lissia-Gorï. Il était gai, doux et tendre, comme la princesse Marie ne l’avait pas vu depuis longtemps ; elle pressentit qu’il lui était arrivé quelque chose, mais il ne lui dit rien de son amour. Avant de partir, le prince André avait causé longuement avec son père et la princesse Marie remarqua qu’avant de se quitter, tous deux étaient mécontents l’un de l’autre. Peu après le départ du prince André, la princesse Marie écrivit de Lissia-Gorï à Pétersbourg, à son amie Julie Karaguine (en ce moment, en deuil d’un de ses frères tué en Turquie), qu’elle rêvait de marier à son frère, comme le font toutes les jeunes filles ;