Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol8.djvu/75

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du valet de pied du prince Vassili qui, en portant de l’eau chaude, la croisa dans le corridor et la salua bas.

Le vieux prince, ce matin, était extraordinairement tendre et bienveillant envers sa fille. La princesse Marie connaissait bien cette expression d’aménité.

C’était l’expression qui paraissait sur son visage alors que de dépit il serrait les poings parce que la princesse Marie ne comprenait pas un problème d’arithmétique ; il s’éloignait d’elle et, à voix basse, répétait plusieurs fois les mêmes paroles.

Aussitôt il commença la conversation en « vous. »

— On m’a fait une demande pour vous, fit-il avec un sourire peu naturel. — Je pense que vous avez deviné que le prince Vassili n’est pas venu ici et n’a pas amené avec lui son pupille (on ne sait pourquoi le prince Nicolas Andréiévitch appelait Anatole, pupille) pour mes beaux yeux. On m’a fait une demande pour vous ; et, puisque vous connaissez mes principes, je m’en rapporte à vous.

— Comment dois-je vous comprendre, mon père ? dit la princesse en rougissant et en pâlissant.

— Comment comprendre ! cria-t-il avec colère. Le prince Vassili te trouve à son goût pour sa bru et te demande en mariage pour son pupille. Voilà comment il faut comprendre. Comment comprendre ? C’est moi qui te le demande.