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paroles et dont il usait dans les cas extrêmes où la conviction était nécessaire.

Mais, mon cher, je fais cela pour moi-même, pour ma conscience, et il n’y a pas de quoi me remercier ; jamais personne ne s’est plaint qu’on l’aimât trop, et enfin tu es libre, tu peux quitter tout dès demain voilà, tu verras toi-même à Pétersbourg. Et pour toi, il est déjà temps de s’éloigner de ces terribles souvenirs. Le prince Vassili soupira : — C’est ainsi, mon âme. Mon valet de chambre partira dans ta voiture. Ah ! oui, j’ai failli oublier, ajouta-t-il encore : — Tu sais, mon cher, que nous étions en compte avec le défunt, alors, du domaine de Riazan, j’ai reçu… mais je garderai chez moi, tu n’en as pas besoin, nous compterons plus tard.

Ce que le prince Vassili appelait « du domaine de Riazan », c’étaient quelques milliers de roubles de redevance qu’il gardait pour lui.

À Pétersbourg, de même qu’à Moscou, l’atmosphère de personnes tendres, aimantes, entoura Pierre. Il ne pouvait refuser le poste ou plutôt le grade — puisqu’il n’avait rien à faire — que lui avait fait obtenir le prince Vassili, et Pierre eut tant de connaissances, d’invitations, d’occupations, qu’encore plus qu’à Moscou il éprouva une sensation de brouillard, de hâte, et d’un bien quelconque, qui toujours devait arriver mais ne se produisait pas.