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commençaient à répondre. Des coups de fusil retentissaient en bas, à l’endroit où étaient les parlementaires.

Lemarrois, avec la lettre sévère de Bonaparte, venait d’arriver chez Murat, et Murat, vexé et désireux de réparer sa faute, faisait aussitôt mouvoir ses troupes sur le centre pour entourer les deux flancs, espérant qu’avant le soir et avant l’arrivée de l’Empereur, il écraserait le petit détachement qui était devant lui.

« Ça commence ! voilà ! » pensa le prince André en sentant le sang affluer plus souvent à son cœur. « Mais, où ? Comment trouverai-je mon Toulon ? » En passant devant ces mêmes compagnies qui, un quart d’heure avant, mangeaient du gruau et buvaient de l’eau-de-vie, il voyait partout les mêmes mouvements rapides des soldats qui s’installaient et choisissaient leurs fusils, et sur tous les visages rayonnait la même animation qui était dans son cœur. « C’est commencé ! Voilà ! C’est terrible et gai ! » semblait dire le visage de chaque soldat ou officier.

Encore, avant d’arriver au retranchement qu’on bâtissait, il aperçut dans la lumière du soir d’un jour sombre d’automne, un cavalier qui avançait à sa rencontre. Ce cavalier en bourka[1], monté sur un cheval blanc, n’était autre que le prince

  1. Pélerine longue en feutre, vêtement caucasien. (N. d. T.).