touzov s’adoucit ; des larmes se montrèrent dans ses yeux. De la main gauche il attira près de lui Bagration, et de la main droite, ornée d’une bague, d’un geste évidemment habituel, il fit sur lui le signe de la croix, puis lui tendit sa joue grasse ; mais Bagration lui baisa le cou.
— Que le Christ t’accompagne ! répéta Koutouzov ; et il se dirigea vers sa voiture. Monte avec moi, — dit-il à Bolkonskï.
— Votre Haute Excellence, je voudrais être utile ici ; permettez-moi de rester dans le détachement du prince Bagration.
— Assieds-toi, — dit Koutouzov. Et en remarquant l’hésitation de Bolkonskï : — Les bons officiers me sont nécessaires à moi-même.
Ils s’installèrent dans la voiture. Il y eut un silence de quelques minutes.
— Il y aura encore beaucoup d’autres affaires, — fit-il avec une expression sénile de perspicacité, comme s’il comprenait tout ce qui se passait dans l’âme de Bolkonskï. — Si demain il ramène la dixième partie de son détachement, j’en remercierai Dieu, — ajouta Koutouzov comme se parlant à lui-même.
Le prince André regarda Koutouzov, et, involontairement, à la distance d’une demi-archine lui sautaient aux yeux les cicatrices, soigneusement lavées, sur les tempes de Koutouzov, où la balle d’Izmaïl lui avait percé le crâne, et son œil perdu.