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faire aucune attention, le valet et un sacristain, portant un encensoir, sortirent sur la pointe des pieds. Ils entrèrent dans le salon de réception que Pierre connaissait, par deux fenêtres italiennes il communiquait avec le jardin d’hiver, et un grand buste et un portrait en pied de Catherine l’ornaient.

Dans le salon de réception, les mêmes personnes, presque toutes dans la même pose, étaient assises et chuchotaient. Tous se turent pour regarder Anna Mikhaïlovna avec son visage pâle et pleurnicheur, et le gros et grand Pierre qui la suivait docilement, la tête baissée.

Le visage d’Anna Mikhaïlovna exprimait la conviction que le moment décisif était venu. Avec les manières d’une petite bourgeoise affairée, elle entra dans la chambre sans quitter Pierre, et se montrait encore plus tendre que le matin. Elle sentait que, conduisant avec elle celui que le mourant désirait voir, sa réception était assurée. Elle jeta un regard rapide sur tous ceux qui étaient dans la chambre, et apercevant le confesseur du comte, sans s’incliner, mais en diminuant tout à coup sa taille, à petits pas, elle s’approcha du confesseur, reçut respectueusement sa bénédiction, et ensuite celle d’un autre prêtre.

— Dieu soit loué ! que nous ayons réussi ! — dit-elle au prêtre, — nous tous les parents, nous avions si peur. Ce jeune homme est le fils du