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Tous se taisaient. Egor Mikhaïlovitch ordonna d’apporter le lendemain l’argent destiné aux recrues : sept kopeks par cour ; puis il déclara l’affaire finie, et il dispersa l’assemblée.

Les bonnets s’enfoncaient sur les nuques ; la foule se mouvait dans un brouhaha de conversations et de pas. L’intendant, resté sur le perron, regardait s’éloigner la foule.

Quand les jeunes Doutlov eurent tourné le coin, il appela le vieux qui s’arrêtait de lui-même, et entra avec lui au bureau.

— Je te plains, vieillard, — dit Egor Mikhaïlovitch, en s’asseyant devant la table. — C’est ton tour. Ne rachèteras-tu pas ton neveu ?

Le vieux, sans répondre, regarda avec importance Egor Mikhaïlovitch.

— Il n’y a rien à faire ! — répondit à son regard Egor Mikhaïlovitch.

— Nous serions heureux de le racheter, mais nous n’avons pas de quoi, Egor Mikhaïlovitch. Nous avons perdu deux chevaux cet été. J’ai marié mon neveu. Évidemment notre sort est tel parce que nous vivons honnêtement. À lui, c’est bon à dire (Il pensait à Riézoune).

Egor Mikhaïlovitch se frotta le visage avec la main et bâilla. Évidemment ça l’ennuyait déjà et il était temps de prendre le thé !

— Eh ! vieux, ne pèche pas, dit-il. Cherche bien à la cave, peut-être trouveras-tu quatre cents roubles ;