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chacune des deux autres avait donné un homme, si bien que l’un d’eux n’était même pas venu à l’assemblée, seule sa femme attristée était derrière tout le monde, espérant vaguement que la roue tournerait peut-être pour son bonheur ; l’autre le roux Romane, en armiak déchiré, bien qu’il ne fût pas pauvre, était appuyé au perron, et, la tête inclinée, se taisait tout le temps ; parfois il regardait celui qui élevait la voix, et de nouveau il baissait la tête. Toute sa personne respirait le malheur.

Le vieux Semion Doutlov était un homme tel, que quiconque le connaissait un peu, lui eût donné à garder des centaines et des milliers de roubles. C’était un homme modéré, craignant Dieu, aisé, en outre, il était marguillier, aussi son acharnement était-il d’autant plus étonnant.

Riézoune, le charpentier, était au contraire un gaillard de haute taille, brun, tapageur, ivrogne, hardi et particulièrement habile dans les discussions et les querelles, dans les assemblées, aux marchés, avec les ouvriers, les marchands, les paysans ou les maîtres.

Maintenant il était calme, mordant, et de toute la hauteur de sa taille, de toute la force de sa voix sonore et de son talent oratoire, il écrasait le marguillier qui suffoquait et perdait pied.

À la discussion prenaient part aussi Garasska, Kopilov, encore jeune, le visage rond, la tête