Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/65

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas la deuxième, mais la troisième, la petite qu’on gardait pour les courses ; en haut, chacun le sait, signifiait la maison des maîtres, même quand elle était en bas. Axutka, c’était le nom de la fillette, courait toujours avec la rapidité d’une flèche, elle ne pliait pas les bras mais les remuait comme un balancier, non pas le long des côtes, mais devant le corps, dans une cadence qui suivait la rapidité de ses mouvements. Ses joues étaient toujours plus roses que sa robe rose ; sa langue remuait toujours avec la même vélocité que les jambes. Elle bondit dans la chambre, et s’accrochant au poêle, elle se mit à se balancer, puis comme si elle avait le désir de ne pas dire plus de trois paroles à la fois, elle prononça d’une voix suffocante, en s’adressant à Akoulina :

— Madame ordonne à Polikeï Ilitch de venir tout de suite en haut, ordonne… (elle s’arrêta et respira profondément.) Egor Mikhaïlovitch était chez madame, on a parlé des recrues, on a nommé Polikeï Ilitch… Avdotia Mikhaïlovna a ordonné qu’il vienne tout de suite. Madame a ordonné… (elle respira de nouveau) qu’il vienne tout de suite.

Pendant une demi-minute, Axutka regarda Polikeï, Akoulina et les enfants qui se montraient sous la couverture, prit une coquille de noisette qui était sur le poêle, la jeta à Anutka, prononça encore une fois : « Venir tout de suite », puis, comme le vent, bondit hors de la chambre, et les balanciers,