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cès ne pouvait s’expliquer que par ce fait : Ivan Petrovitch Apikhtine, homme doux et pacifique par excellence, qui ne voulait pas, pour cette affaire, s’en remettre aux tribunaux, convaincu de son droit, n’avait pris aucune mesure contre les agissements des paysans. Ivan Mironov, le délégué de ceux-ci, un homme sec, au nez aquilin, qui savait lire et écrire, ancien maire et percepteur des impôts, demanda aux paysans cinquante kopeks par âme et distribua très intelligemment cet argent en cadeaux et mena fort habilement cette affaire. Aussitôt après la décision du tribunal du district, Apikhtine vit le danger. Il donna sa procuration à un homme d’affaires habile, un affranchi, Ilia Mitrofanov, qui déposa en instance supérieure un appel contre la décision du tribunal du district. Ilia Mitrofanov arrangea si bien les choses que malgré toutes les ruses du délégué des paysans, Ivan Mironov, malgré les cadeaux importants qu’il donna aux membres de la deuxième instance, le jugement était cassé et l’arrêt rendu au profit du propriétaire. La terre devait être reprise aux paysans, ce qui fut déclaré à leur délégué.

Ivan Mironov fit savoir à leur assemblée que les messieurs de la ville avaient pris parti pour le propriétaire et avaient tellement embrouillé l’affaire qu’on allait leur retirer la terre, mais que la cause du propriétaire n’était pas encore gagnée, car lui, Mironov avait déjà écrit une