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incompréhensible. Cette réflexion gêna Ivan Pavlovitch. De nouveau il ne savait pas s’il fallait ou non se réjouir de l’arrivée de Labazov, et pour résoudre définitivement cette question, il dirigea ses pas dans la salle où les gens sages se réunissaient pour causer, où l’on connaissait l’importance et le prix de chaque objet, en un mot où l’on savait tout. Ivan Pavlovitch était en aussi bonnes relations avec le groupe des sages qu’avec la jeunesse dorée et les grands personnages. Il est vrai qu’il n’avait pas de place marquée dans la chambre des sages, mais personne ne s’étonna quand il entra et s’assit sur le divan… On s’occupait de savoir en quelle année et à quel propos avait éclaté une querelle entre deux journalistes russes. Ivan Pavlovitch profita d’un moment de silence pour placer sa nouvelle, non comme un événement joyeux, mais comme une chose sans importance, dite par hasard.

Mais aussitôt, à la façon dont les « sages » (j’emploie le mot sages comme surnom des habitués de la chambre des sages) accueillirent la nouvelle et se mirent à la discuter, Ivan Pavlovitch comprit aussitôt qu’elle était précisément ici à sa place, qu’ici seulement elle prendrait l’ampleur nécessaire pour aller plus loin, et qu’ici seulement il pourrait savoir à quoi s’en tenir.

— Il ne manquait que Labazov, — dit un des sages. — Tous les décembristes restés vivants sont de retour en Russie.