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attachée très bas sur le cou, voûté à force de maigreur, et qui semblait être de bois.

À travers la lèvre pendante, on apercevait la langue noire, mordue de côté, et les restes jaunes des dents inférieures, rongées. Les oreilles, dont une était coupée, tombaient bas de côté et ne s’agitaient que rarement, paresseusement, pour chasser les mouches qui s’accrochaient.

Une mèche assez longue du toupet pendait derrière l’oreille. Le front large était enfoncé et ridé ; la peau pendait en poches sur les larges creux et, sur le cou et la tête, s’entrecroisaient des veines qui tremblaient et frissonnaient au moindre contact des mouches. L’expression de la face était sévère et patiente, profonde et souffrante.

Les pattes de devant étaient arquées aux genoux ; les deux sabots couverts d’excroissances, et l’une des pattes, pie jusqu’à moitié, portait près du genou une tumeur de la grosseur du poing. Les pattes de derrière étaient plus solides, mais visiblement limées sur les cuisses depuis longtemps, et, à ces endroits, les poils ne poussaient plus. La maigreur du corps faisait paraître les pattes démesurément longues. Les côtes, bien que très raides, étaient si découvertes et si tendues que la peau semblait être collée entre elles. Le garrot et le dos portaient des traces de coups anciens, et derrière il y avait encore une tumeur fraîche, gonflée, qui suppurait. Le