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chaque scribe, saluaient et, d’un air profond, écoutaient la décision apportée par le scribe que le propriétaire connaissait.

Tout espoir de terminer l’affaire le jour même était perdu et le remplaçant commençait à devenir plus gai et plus libre, quand Doutlov aperçut Egor Mikhaïlovitch. Aussitôt il le salua et se cramponna à lui. Egor Mikhaïlovich s’arrangeait si bien qu’environ trois heures après, le remplaçant, à son grand étonnement et à son grand ennui, était introduit dans la chancellerie, et à la gaieté générale, à commencer par le gardien jusqu’au président, il était déshabillé, rasé, habillé, et on le laissa sortir derrière la porte ; cinq minutes après, Doutlov donnait l’argent et en recevait la quittance puis, disant adieu au propriétaire et au remplaçant, il se rendit au logis du marchand où étaient les recrues de Pokrovskoié. Ilia et sa jeune femme étaient assis dans un coin de la cuisine du marchand. Aussitôt que le vieux entra, ils cessèrent de parler et le fixèrent avec une expression docile et malveillante. Comme toujours, le vieux pria Dieu, ôta sa ceinture, puis tira un papier et appela dans l’izba son fils aîné Ignate et la mère d’Iluchka qui étaient dans la cour.

— Ne fais pas de péchés, Iluchka, — dit-il en s’approchant de son neveu. — Hier soir, tu m’as dit de telles paroles ! Est-ce que je ne te plains pas ? Je me rappelle comment mon frère t’a confié à