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Les enfants étaient aussi impatients du retour de leur père, mais pour une autre cause, Anutka et Machka n’avaient plus la pelisse et l’armiak qui leur donnaient la possibilité de sortir dans la rue, au moins à tour de rôle, et ainsi étaient forcées de rester à la maison, en chemise, à tourner avec une rapidité doublée, de sorte qu’elles dérangeaient passablement les habitants du pavillon qui entraient et sortaient. Une fois Machka tomba sur les jambes de la femme du menuisier qui portait de l’eau, et bien qu’elle se mît à hurler d’avance, en tombant à genoux, elle reçut cependant une volée et pleura encore plus fort. Quand elle ne se heurtait contre personne, alors, à l’aide du baquet, elle grimpait sur le poêle. Seules, Madame et Akoulina s’inquiétaient sérieusement pour Polikeï lui-même, et les enfants ne songeaient qu’à ce qu’il portait sur lui. Pendant le rapport d’Egor Mikhaïlovitch, quand Madame lui demanda si Polikeï n’était pas de retour et où il pouvait être, il sourit et répondit : «Je ne puis le savoir» ; mais on voyait qu’il était content de voir se justifier ses suppositions. « Il viendra probablement pour dîner », dit-il avec importance.

De toute la journée, personne à Pokrovskoïé ne savait rien de Polikeï. Après seulement on apprit que des paysans voisins l’avaient vu qui trottait sur la route, sans bonnet, et demandait à tous les passants « s’ils n’avaient pas trouvé la lettre ? » Un autre l’avait vu endormi au bord de la route,