Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol5.djvu/37

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Il est parti.

— Comment, parti ? Qu’a-t-il ordonné de dire ?

— Rien. Il s’est assis dans la voiture et a filé.

— Un bon coquin, — dit le hussard.

— Eh bien ! pensai-je, après un tel affront, il ne viendra pas de sitôt. Mais non.

Le lendemain soir il vint. Il passa dans la salle de billard. Il portait une boîte quelconque.

Il ôta son pardessus.

— Allons jouer, — dit-il.

Il regarde en dessous, furieux.

Nous jouâmes une partie.

— Assez, dit-il. Apporte-moi la plume et le papier, je dois écrire une lettre.

Moi, sans penser à rien, j’apporte le papier, le pose sur la table de la petite chambre.

— C’est prêt, monsieur, — dis-je.

Bon. Il s’assied à la table. Il écrit, écrit, murmure sans cesse quelque chose, ensuite bondit, sombre.

— Va voir si ma voiture est arrivée, — dit-il.

C’était le vendredi de Carnaval, alors il n’y avait pas de clients, tous étaient aux bals. J’allai me renseigner. Mais aussitôt que je fus sur la porte, je l’entends crier, comme effrayé de quelque chose :

— Pétrouchka ! Pétrouchka !

Je me retourne. Je regarde : il est debout, blanc comme un linge ; il me regarde.

— Vous m’avez appelé, monsieur ? — dis-je.