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son, en silence, fort habilement, inscrivait ses points sous la carte et, sous la table écornait de petits angles les autres cartes. Le Grec était assis à côté du banquier, et comme s’il attendait quelque chose, de ses yeux noirs, enfoncés, suivait attentivement le jeu. Zavalchevskï, debout près de la table, se mettait tout à coup en mouvement, tirait de la poche de son pantalon un billet rouge ou bleu, plaçait au-dessus la carte, et la frappant de sa main ouverte, prononçait : « Sept, sauve-moi ! » Il mordillait ses moustaches, se balançait d’une jambe sur l’autre, rougissait et était pris d’une agitation qui durait jusqu’à ce que la carte fût sortie. Iline mangeait du veau et du concombre, placés près de lui sur le divan de crin, et, essuyant rapidement ses mains à son veston, mettait une carte après l’autre. Tourbine, qui tout d’abord était assis sur le divan, comprit tout de suite de quoi il s’agissait. Loukhnov ne regardait pas du tout le uhlan et ne lui disait rien, mais de temps en temps ses lunettes se dirigeaient pour un moment sur les mains du uhlan ; la plupart des cartes de ce dernier perdaient.

— Ah ! ce serait bien si je battais cette carte, — disait Loukhnov en parlant de la carte du gros propriétaire qui jouait à cinquante kopeks la mise.

— Battez plutôt celle d’Iline, la mienne, la belle affaire ! — remarquait le propriétaire.

En effet, les cartes d’Iline étaient battues plus