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le parapet, près duquel se trouvait le mortier. Il voyait clairement comment les Français couraient droit sur lui par un endroit libre et comment leur foule, avec des baïonnettes brillant au soleil, s’agitait dans les tranchées les plus proches. Un Français, petit, aux larges épaules, en uniforme de zouave, l’épée au clair, courait en avant et sautait par-dessus les fossés : « Tirez à mitraille ! » cria Volodia en bondissant de la banquette. Mais les soldats avaient déjà opéré sans lui. Un son métallique de mitraille sifflait par-dessus sa tête d’abord de l’un, puis de l’autre mortier. « Premier ! second ! » commandait Volodia, en courant d’un mortier à l’autre et oubliant tout à fait le danger. De côté, on entendait le craquement des fusils de notre couverture et les cris précipités.

Tout à coup un cri perçant de désespoir répété par quelques voix s’entendit à gauche : « Il vient par derrière ! Il vient par derrière ! » Volodia se retourna à ce cri. Une vingtaine de Français se montraient derrière. L’un d’eux, un bel homme à barbe noire, était devant tous. Il s’approcha à dix pas de la batterie, s’arrêta et tira droit sur Volodia, ensuite courut de nouveau sur lui. Pendant une seconde, Volodia restait comme pétrifié et n’en croyait pas ses yeux. Quand il se ressaisit et regarda devant lui, sur le parapet se trouvaient les uniformes bleus, même deux Français à dix pas de lui, enclouaient le canon. Autour de lui,