— Signer ? Mais nous travaillons maintenant et nous continuerons. À quoi bon tout cela ? Nous sommes des ignorants.
— Nous ne pouvons pas accepter cela, ça n’est pas dans nos habitudes. Que les choses restent comme elles sont ; qu’on nous décharge seulement des semences ! crièrent des voix.
Décharger des semences, cela signifiait que le propriétaire eût à donner le grain que les paysans étaient tenus de fournir pour les champs qu’ils travaillaient.
— Ainsi vous refusez ? Vous ne voulez pas prendre la terre ? dit Nekhludov à un jeune paysan à la figure luisante, nu-pieds, en caftan déchiré, tenant dans sa main gauche sa casquette déchirée, à la façon des soldats qui ont reçu de leurs chefs l’ordre de se découvrir.
— Parfaitement, répondit celui-ci, pas encore délivré de l’hypnotisme militaire.
— Alors c’est que vous avez assez de terres ? demanda Nekhludov.
— Non ! répondit l’ancien soldat, à l’air apprêté, tenant devant lui sa casquette déchirée, comme s’il la proposait à qui la voudrait prendre.
— Enfin, réfléchissez à ma proposition, dit Nekhludov stupéfait. Et il la leur répéta.
— C’est tout réfléchi. Comme nous l’avons dit. Ce sera ainsi, confirma d’un ton hargneux le sombre vieillard édenté.