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Vous n’avez rien à faire ici ! cria-t-il à la foule sans même savoir de quoi il s’agissait.

Quand il aperçut, gisant sur le pavé, le prisonnier mourant, il fit un signe de tête approbatif, comme s’il s’était attendu à voir cela, et s’adressant à l’agent :

— Comment est-ce arrivé ?

L’agent raconta qu’au passage du convoi ce prisonnier était tombé et que l’officier avait ordonné de le laisser là.

— C’est bien ! Il n’y a qu’à le porter au poste ! Un fiacre !

— Le portier vient d’y courir, dit l’agent en portant la main à sa casquette.

L’employé s’était remis à dire quelque chose sur la chaleur.

— Est-ce ton affaire, à toi ? Hein ? Décampe un peu ! lui cria l’officier de police, en lui jetant un regard si sévère qu’il s’arrêta net.

— Il faut lui donner un peu d’eau, répéta Nekhludov.

L’officier regarda sévèrement Nekhludov, mais ne souffla mot. Quand le portier revint, portant un gobelet d’eau, l’officier de police ordonna à l’agent de faire boire le prisonnier. L’agent lui souleva de nouveau la tête et essaya de lui verser de l’eau dans la bouche. Mais le prisonnier ne l’avalait pas et l’eau découlait sur sa barbe, mouillant sa chemise et sa capote couvertes de poussière,