— Il y aura séance au Sénat cette semaine, lui dit-on, mais il est peu probable que l’affaire de Maslova y soit appelée. Cependant, si on le demande, on peut toujours espérer qu’on l’examinera mercredi de cette semaine.
Pendant que Nekhludov attendait ces divers renseignements à la Chancellerie du Sénat, il entendit de nouveau parler du duel et apprit comment avait été tué le jeune Kamensky. Ici, pour la première fois, il connut tous les détails de ce duel qui attirait alors l’attention de tout Pétersbourg. Dans un restaurant, des officiers mangeaient des huîtres et buvaient ferme, suivant leur coutume. L’un d’eux fit une remarque blessante sur le régiment où servait Kamensky. Celui-ci le traita de menteur. L’autre souffleta Kamensky. Le duel avait eu lieu le lendemain. Kamensky, atteint d’une balle dans le ventre, était mort deux heures plus tard. Le meurtrier et les témoins avaient été arrêtés et mis aux arrêts, mais on assurait qu’ils seraient relâchés dans quinze jours.
Du Sénat, Nekhludov se rendit à la commission des grâces, chez un haut fonctionnaire très influent, le baron Vorobiev, qui occupait un luxueux appartement dans le bâtiment de l’État. Le portier et le laquais informèrent Nekhludov, d’un ton sévère, que le baron n’était visible que les jours de réception : aujourd hui, il était chez l’Empereur, demain il devait y retourner pour le rapport.