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reste, je la verrai aujourd’hui », songea Nekhludov ; et il sortit s’habiller.

Quand il vint sur le perron, un cocher, qui le connaissait, l’attendait déjà avec une voiture aux roues caoutchoutées.

— Hier soir je suis arrivé chez le prince Kortchaguine comme vous veniez de sortir, dit le cocher en tournant son cou halé et puissant, gainé dans le col blanc de sa chemise, et le portier m’a dit : « Il vient de partir ».

« Même les cochers sont instruits de mes relations avec les Kortchaguine », pensa Nekhludov ; et de nouveau il envisagea la question non résolue, qui l’occupait sans cesse les derniers temps : épouser ou non la jeune princesse Kortchaguine ; et comme pour la plupart des questions qui se présentaient à lui en ce moment, il ne parvenait pas à se décider dans un sens ou dans l’autre.

En faveur du mariage, en général, deux arguments se présentaient. Premièrement : outre le calme du foyer domestique, c’était la possibilité d’une existence honnête, écartant les inconvénients d’une vie sexuelle irrégulière ; deuxièmement et principalement, Nekhludov avait l’espoir de donner, par une famille et des enfants, un sens à sa vie, maintenant sans objet. Tels étaient ses arguments en faveur du mariage, en général. Contre le mariage, en général, il avait cette sorte de crainte de la perte de leur liberté que ressen-