Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol36.djvu/407

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Eh bien, voici, — dit-elle, — laissez-moi, c’est certain ce que je vous dis. C’est plus fort que moi. Ne vous occupez plus du tout de moi, — dit-elle de nouveau les lèvres tremblantes, et se tut. — J’aimerais mieux me pendre. C’est vrai ce que je vous dis.

Outre la haine pour lui, et le ressentiment de l’inoubliable offense, Nekhludov sentait qu’il entrait dans ce refus quelque chose d’autre : beau et noble. Et la façon assurée et paisible dont elle lui renouvelait son refus eut pour effet de détruire immédiatement tous ses doutes, et de le replacer dans la disposition grave et attendrie où il s’était trouvé envers elle auparavant.

— Katucha, je maintiens ce que je t’ai dit, — reprit-il très sérieusement. — Je te prie de m’épouser. Si tu t’y refuses, aussi longtemps que tu t’y refuseras, je resterai près de toi, je te suivrai ; j’irai où l’on t’enverra.

— C’est votre affaire, moi je ne dirai pas un mot de plus, — répondit-elle, et, de nouveau, ses lèvres tremblèrent.

Il se tut, ne se sentant pas aussi la force de parler.

— Je vais maintenant aller à la campagne, et ensuite à Pétersbourg, — reprit-il au bout d’un moment. — Là je m’occuperai de notre affaire ; et, si Dieu le veut, on cassera l’arrêt.

— Qu’on le casse ou non, tout m’est égal. Si je n’ai pas mérité pour cela, j’ai mérité pour autre